« LETTRE POUR ÉLÉNA » Chroniques du regard 2017-18 No 2, par Mario Veillette
Lettre pour Éléna, le premier spectacle jeunesse et famille de la saison de la Rotonde est présenté au Théâtre jeunesse Les Gros Becs. Il réunit les chorégraphies de Christophe Garcia et les textes d’Érika Tremblay-Roy. À la frontière du théâtre et de la danse, Lettre pour Éléna est un spectacle dans lequel se dévoile la destinée de trois jeunes filles. Créée à Marseille en 2015, cette coproduction franco-québécoise a été présentée plus de 50 fois au Québec et en France. En 2016, elle a été récipiendaire du Prix du CALQ (œuvre de l’année en Estrie) ainsi que du Prix RIDEAU | LOJIQ – Francophonie.
« Lettre pour Éléna » c’est pour vous si vous aimez les spectacles destinés à la famille (8 ans et plus).
« Lettre pour Éléna » c’est pour vous si vous aimez les univers poétiques et les spectacles intégrant danse et théâtre.
« Lettre pour Éléna » c’est pour vous si vous voulez voir un spectacle dont les personnages principaux sont des filles.
L’argument : Quelque part en campagne, trois jeunes aux filles aux pieds nus et en robes rouge jouent ensemble. L’école est terminée. Elles sont sur le bord de la route et trouvent une série d’objets et de lettres déposés là, à leur intention. Les lettres renferment des messages de tout le monde, sauf d’Éléna, l’amie absente, la quatrième de la bande. Un oiseau passe parfois. Il semble aussi tenter de leur laisser un message.
À travers le texte et la danse, les trois personnages chemineront vers une prise de conscience de leur réalité en empruntant divers circuits et détours. La mise en espace est minimaliste, composée d’une grande structure de bois qui aura des utilisations variées ainsi que d’une projection presque fixe en fond de scène mais les accessoires sont riches, variés et porteurs d’imagination.
Les compagnies coproductrices du spectacle sont Le Petit Théâtre de Sherbrooke et La [parenthèse] – Christophe Garcia. Depuis plus de 40 ans, Le Petit Théâtre de Sherbrooke crée et diffuse des œuvres de théâtre jeunesse et famille. Sous la direction d’Érika Tremblay-Roy depuis 2013, il continue à développer la pratique de création théâtrale basée sur les mots et la dramaturgie tout en expérimentant avec diverses équipes multidisciplinaires. La compagnie française de danse La [parenthèse] – Christophe Garcia, basée à Marseille, offre un éventail des petites formes qui côtoient des spectacles plus ambitieux. Le désir de son créateur de créer des ponts l’ont amené à de nombreuses collaborations multidisciplinaires sur des scènes autant françaises qu’européennes et même américaines. Les deux compagnies ont aussi coproduit le spectacle Jour 1 en 2013.
Le texte est écrit par Érika Tremblay-Roy, comédienne, auteure et metteure en scène. Auteur publiée depuis 2003, elle a, entre autres, signé L’écho du coquillage (2003), Tante T (2005 – finaliste au Prix Annick-Lansman en 2010), Les boutons (2007), Autopsie d’une napkin (Prix Louise-LaHaye 2012) et Petite vérité inventée (2013) finaliste aux Prix littéraires du Gouverneur général et au Prix Louise-LaHaye. Le texte Lettre pour Éléna est disponible chez Éditeur Lansman.
La chorégraphie de Christophe Garcia se veut très vive et enjouée. Entrecoupée de textes dits par les danseuses-comédiennes, les danses sont de facture moderne et contemporaine, parfois descriptive et solidement rattachées aux textes, parfois un peu plus libres et évocatrices de sentiments et d’émotions. Les danses ont été créées en collaboration avec les danseuses.
Danseur de formation, le chorégraphe a fréquenté l’Atelier Rudra Béjart et intégré le Béjart Ballet Lausanne en 1998. Depuis la fondation de sa compagnie (2001), il a gagné plusieurs prix internationaux de chorégraphie, dont le XXe Concours international de Hanovre et Biennale de la Danse de Pesaro. Il a été invité à créer pour plusieurs compagnies de répertoire dont l’Opéra-théâtre d’Avignon, le Jeune Ballet du Québec, le Jeune Ballet de France et le Béjart Ballet Lausanne.
Sur scène, les danseuses-comédiennes sont Marion Baudinaud, Alex-Ann Boucher et Nina-Morgane Madelaine. Dans une mise en scène sobre et efficace, les interprètes font preuve d’une solide maîtrise technique et d’une grande sensibilité. Au fil des nombreuses représentations, le travail théâtral et de création chorégraphique s’est profondément ancré dans leurs corps. Les impulsions et modulations de leurs personnages sont clairement perceptibles, autant dans leurs danses que dans leurs jeux. Les accents parlés sont tributaires de l’origine française ou québécoise des interprètes. On retrouve donc sur scène un mélange d’accents qui renforce encore la véracité du jeu.
Le travail de création a été fait en plusieurs étapes, au Québec et en France, parfois avec tout l’équipe, parfois avec les créateurs chacun de leur côté. Selon les extraits du cahier pédagogique et d’un reportage vidéo sur travail en cours de production :
« …tout a commencé par une image : celle d’écrire un spectacle pour trois jeunes filles en robes rouges. Érika est d’abord partie en écriture, au rythme de la symphonie tragique de Schubert, guidée par l’envie d’un spectacle fougueux et lumineux. Au terme de cette première phase, et des bribes de texte qui en ont émergé, s’est amorcé le premier laboratoire de création, avec la volonté immédiate d’articuler le texte et la danse. En outre, tout au long de ces premiers moments d’exploration, les deux artistes ont également rencontré des enfants en médiation, afin que ceux-ci nourrissent pleinement, et dès son entame, cette phase de recherche.
… le texte donnait au chorégraphe des outils et des appuis pour danser (par les mots, la rythmique ou la poésie émanant du texte) … Tous deux avaient en outre à cœur de chercher en permanence un point d’équilibre entre texte et mouvement. »
Critiques :
Les différentes critiques parlent d’une mise en scène « subtile et qui ne fait jamais dans le pathos » (Source : Tiphaine Le Roy, La Scène, France, Printemps 2016.
Elles parlent aussi d’un texte « qui fait appel à l’intelligence de son jeune public, en traitant le thème de la mort de façon pertinente et audacieuse. La construction dramatique est habile et l’intrigue, forte. La mise en scène poétique et rythmée mélange les disciplines de façon organique ». (Source : Prix du CALQ 2016)
On y salue la plume de l’auteur : « La trame de l’auteure fait vibrer la corde sensible, chez les petits comme chez les grands. C’est plein de tendresse, de beauté et de douceur. Lettre pour Éléna est une longue déclaration d’amour et d’amitié, un touchant moment pour apprendre à dire au revoir. » (Source : Daphné Bathalon) en rappelant que « Ce n’est pas la première fois qu’on le remarque : Érika Tremblay-Roy a ce don, rare, de raconter l’enfance avec justesse. Elle sait semer le rire au moment où il le faut et, la minute d’après, planter un peu de gravité dans le récit. Tout en finesse et en fraîcheur, dépouillé d’artifices, le texte qu’elle a pondu est superbe de doigté et de délicatesse. Il dit tout sans rien brusquer. » Source : Karine Tremblay, Journal La Tribune, Sherbrooke, 12 novembre 2015
« … une avalanche d’émotions distillée dans un monde de tendresse. Une très belle réussite, un spectacle à voir absolument ! » (Source : Didier Philispart).
Source: Chroniques du regard 2017-2018 No2, par Mario Veillette, octobre 2017.