Chroniques du regard 2017-18 No 14 – Infinity Doughnut – Compagnie Katie Ward
La chorégraphe montréalaise Katie Ward présentera trois fois, dans le Studio A de la Maison pour la danse, le spectacle performatif Infinity Doughnut, un quatuor d’environ 65 minutes qui se veut une expérience pour le spectateur avide de plaisir et de découvertes.
Photo : Svetla Atanasova
« Infinity Doughnut » c’est pour vous si vous aimez les spectacles qui renouvellent le regard porté sur le monde, utilisant dans le processus une grande part de spontanéité.
« Infinity Doughnut » c’est pour vous si vous aimez les contacts réels, francs et directs avec les interprètes.
« Infinity Doughnut » c’est pour vous si êtes prêt à vous abandonner à un flot d’actions et de saynètes interconnectés qui forment un univers ludique en constante transformation.
Photo : Svetla Atanasova
Le spectacle
Faisant suite à ses intérêts multiples portant sur la science, sur la connectivité des choses et des individus ainsi que sur l’étude de la perception du monde (différente pour chacun), la chorégraphe poursuit ses mises en scènes d’événements performatifs tels que présentés dans plusieurs cadres et dans différents pays depuis plus de 10 ans.
La chorégraphe décrit Infinity Doughnut comme étant « un système de navigation aveugle » impliquant une exploration basée sur des spéculations, devenant ainsi un examen de la matière, inanimée tout autant qu’humaine. Dans l’aire de jeu, en plus des interprètes, les spectateurs participent aussi à cette étude. Ils sont à proximité des performeurs et, encouragés par le discours de la chorégraphe, ils sont invités à s’abandonner, à se laisser aller dans tout ce qui peut advenir, à céder au flot des actions, à accueillir changements et spontanéité dans la structure du spectacle.
Le spectacle se décline comme une suite de courtes scènes jonglant avec l’idée de dévoiler un environnement en constante évolution. Incluant une forte dose de travail de partenaire, en duo autant qu’en quatuor, les structures de travail sont claires. L’utilisation de mouvements souvent improvisés aide à renforcer l’esprit de (re)découverte à la base du travail de la chorégraphe.
À de nombreuses reprises durant le spectacle, des chaines humaines répondent à l’élasticité de leurs liens de manière organique et intuitive (et parfois même avec humour). Ces chaines s’étendent ou se referment en de multiples organisations spatiales, intégrant de la part des interprètes des portés et échanges de poids parfois périlleux. Ainsi, les danses obtenues deviennent tout aussi excitantes pour le public que pour les interprètes, qui carburent au plaisir tout en restant très fortement à l’écoute de leurs partenaires.
Faisant partie de la signature chorégraphique de Katie Ward, l’inclusion dans la danse de mouvements issus de gestes quotidiens est aussi présente dans le spectacle. Les spectateurs retrouveront facilement les sources de certains gestes et mouvements, ici mis en scène dans une même intention séminale d’examen et de redécouverte.
Les séquences chorégraphiques laissent de la place à la personnalité de chacun des interprètes, qui peut réagir avec inventivité à chacune des propositions. Dans un processus toujours créatif, chacun trouve sa manière d’enrichir la danse et de répondre aux impulsions des autres en intégrant à son jeu ses préférences, habitudes et habilités particulières. “You’re watching four minds working together where they’re copying the movement that each is proposing, while at the same time, they’re injecting their own preferences and interests,” said Ward. “The type of movement quickly jumps from one modality to another. They have a set of rules that they follow but it’s not set movements. They follow the same way of behaving each time, but the movements are always different.” Source: Victor Swoboda, The Montreal Gazette.
Photo : Svetla Atanasova
La chorégraphe
Fondatrice en 2011 de la compagnie qui porte son nom, Katie Ward est installée à Montréal. Après avoir étudié à la School for Contemporary Dancers de Winnipeg et à l’Université Concordia, elle a ensuite enseigné le processus créatif au département de danse contemporaine de cette dernière institution.
Elle a présenté ses œuvres dans différentes villes du Canada ainsi qu’en France et au Royaume-Uni. Chorégraphe, elle a notamment présenté à Tangente, en début de carrière, Collapsible Uprisings (2004). The Thrills: Wilderness Retreat (2005) et Hawks and Doves (2007). Elle est aussi cofondatrice de The Choreographers, un groupe d’artistes qui, entre 2008 et 2011, a créé les spectacles Man and Mouse et Oh! Canada.
Les intérêts de Ward passent par la recherche sur les perceptions, les liens énergétiques, la coexistence et les interconnexions. Son travail s’appuie sur des systèmes utilisant l’imaginaire comme source de découvertes et de redécouvertes des objets, des individus et des relations qui les entourent. Elle décrit sa démarche comme : « utilisant des techniques de la tension et du relâchement, elle crée des performances qui permettent aux spectateurs et aux danseurs de se soulager à travers une catharsis authentique. Proposant une gamme complète d’interactions passant de la violence à la tendresse, sur des tons sincères et poétiques, son éventail d’imagerie s’ouvre sur le monde sans avantager une forme d’expression particulière sur une autre. Animés par des pulsions énergétiques, ses danseurs libèrent des quantités excessives de machisme, de joie et d’agressivité les uns sur les autres les menant à des déséquilibres de pouvoir. » Source : FOUND
Parmi ses plus récentes créations, on retrouve les pièces de groupe Rock Steady (2010) et Infinity Doughnut (2014), le solo Matière grise (2016) et le duo Reality Machine (2017). Elle a aussi créé le trio performatif Human Synthesizer avec le compositeur Michael Feuerstack et le concepteur d’éclairages Paul Chambers, deux collaborateurs impliqués dans Infinity Doughnut.
Les interprètes
Les quatre interprètes montréalais ont tous été vus récemment sur différentes scènes de Québec. Il s’agit de Dany Desjardins, Patrick Lamothe, Audrée Juteau et Peter Trosztmer. Les deux derniers travaillent régulièrement avec la chorégraphe et font partie des fondateurs du groupe The Choreographers.
Les collaborateurs
À la dramaturgie: k.g. Guttman ; à la création sonore: Michael Feuerstack ; à la création lumières: Paul Chambers; à la création costumes: Katie Ward et aux conseils artistiques : Kathy Casey.
Photo : Svetla Atanasova
Les critiques
« C’est sans doute une œuvre interactive mais nous pourrions même aller jusqu’à dire que c’était parfois un atelier impromptu dans lequel les invités étaient appelés à participer aux propos de la créatrice. C’est définitivement un style de spectacle stimulant pour ceux qui aiment être interpellés de façon directe par des danseurs. Je ne vous dirai pas exactement comment pour ne pas vendre la mèche… Autrement, un autre aspect rafraîchissant de l’œuvre était son côté humoristique, relax, qui ne se prenait pas trop au sérieux. Si la danse peut parfois être sombre ou très intellectuelle, Infinity Doughnut était capable de prendre un sujet spirituel inspiré des trouvailles de la physique quantique et rendre le tout très ludique et amusant. »
Source : Olivier Koomsatira, Danse Nouvelles Montréal.
« Infinity Doughnut, la nouvelle création délicieusement délirante, tout en drôlerie et finesse, de Katie Ward… La chorégraphe y met en mouvement de manière limpide des phénomènes physiques. Lui prêtent main-forte quatre danseurs infiniment magnétiques et une partie du public… Les performeurs époustouflants de virtuosité interprètent une partition très exigeante avec une grande sensibilité et l’air de ne pas y toucher. Dans Infinity Doughnut, tout coule de source. »
Source : Nayla Naoufal, Le Devoir.