Chroniques du regard 12.13, no. 1 – Complexe des genres
Première à nous présenter son œuvre cette année, Virginie Brunelle est une chorégraphe talentueuse qui, avec sa compagnie, entreprend cette année une première tournée québécoise. Comme beaucoup de ses jeunes collègues, elle fait partie d’une relève qui a fait ses classes à l’université. Elle ne fait donc pas partie d’une génération spontanée de créateurs, comme le public semble généralement le croire, mais découle plutôt des travaux de ses prédécesseurs. Elle reconnait spontanément l’influence de plusieurs chorégraphes montréalais actuels, Dave Saint-Pierre et Daniel Léveillé entre autres. Pour ma part, j’irais plus loin, la reliant jusqu’au Paul-André Fortier des années 1980 et aux bouillonnements effervescents du groupe Nouvelle-Aire des années 1970.
Ses spectacles sont très dansés, athlétiques et énergiques. Ils se situent dans un courant montréalais assez proche de la danse-théâtre «apparue au milieu du XXe siècle, en Allemagne avec l’expressionnisme allemand (…) sous le nom de Tanztheater. C’est Pina Bausch et sa compagnie le Tanztheater Wuppertal, qui en furent dès 1974 les grands promoteurs en Europe. Dans les années 1980, la nouvelle danse française a oscillé entre danse-théâtre et théâtre dansé, mettant l’accent tantôt sur une discipline, tantôt sur l’autre.» (Extrait de Wikipedia, projet d’encyclopédie collective établie sur Internet.)
Suivant cette lignée, les chorégraphies très actuelles de Virginie Brunelle permettent l’existence et l’expression de personnages dans des situations «dramatiques». Dans Complexe des genres, selon les différents tableaux, Brunelle essaie de mixer l’approche concise, crue et clinique de Daniel Léveillé avec la narrativité de Pina Bausch (voir les liens vidéos). La scénographie y est dépouillée. On retrouve sur scène des personnages qui se débattent principalement pour établir des relations de couple.
Les rapports à l’autre y sont souvent présentés de manière archétypale. L’autre, dans ce cas-ci, c’est le membre du sexe opposé, celui qui pourra devenir partenaire. Les tensions et les ambiguïtés des rapports sont dansées à travers des mouvements à caractère cru et émotif. Les très nombreux portés semblent souvent périlleux. Ils présentent la femme toujours prête à s’abandonner, à se mettre en danger et à la merci des hommes. Les partenaires sont souvent interchangeables. Les histoires de l’un peuvent être continuées avec un nouveau partenaire, ou par un autre duo qui vient prendre la place du premier.
Un spectacle à voir et à discuter avec vos partenaires potentiels ou actuel(s)!
Liens Internet
Attention : Scènes de nudité
Extrait de la chorégraphie « Complexe des genres »
Un exemple du travail de Daniel Léveillé
Bande annonce du film de Wim Wenders « Pina »
Intégrale du nouveau spectacle sans titre de Dave St-Pierre
Pour le plaisir, un duo plus classique de William Forsythe
À lire: «Danse contemporaine et théâtralité» (1995) de Michèle Febvre.